Volume 7: Num. 1 (2011)
Rawls and Sustainable development
Gail E. Henderson
Résumé: Le concept de développement durable est omniprésent dans le droit environnemental et les politiques environnementales mais sa signification et ses objectifs demeurent nébuleux. Cet article utilise la théorie de la justice de Rawls pour mettre en place une structure possible du développement durable, qui tient compte à la fois des impératifs du développement économique et de la justice intergénérationnelle. Cette structure se base sur deux principes tirés de la théorie de la justice de Rawls. En premier lieu, la théorie de la justice de Rawls suggère une alternative au paradigme actuel de la croissance économique continue en fournissant une fin ou un but au développement économique, soit l’établissement et le maintien d’institutions justes. En second lieu, une compréhension large du principe de juste égalité des chances de Rawls, compris comme étant la préservation des opportunités pour les générations futures de développer leur propre conception du bien, peut aider à définir les obligations des générations présentes envers les générations futures et constitue un principe fondamental à partir duquel des règles et des institutions peuvent être conçues et évaluées. Enfin, cet article examine si le principe de juste égalité des chances pour les générations futures peut former la base d’un consensus large (« overlapping consensus ») sur l’importance de la protection de l’environnement parmi les citoyens ayant des opinions divergentes sur la valeur de la nature.
Benoît Mayer
Résumé: La notion de « réfugié environnemental » n’est pas seulement infondée en l’état actuel du droit, indéfinissable et impraticable. Plus fondamentalement, cet article montre qu’elle a mené à une conception erronée des migrations induites par un changement environnemental, lesquelles ont essentiellement été perçues par analogie avec l’asile politique. Or, une réponse spécifique à la protection des personnes affectées par les changements environnementaux ne doit pas se résumer à une protection des droits fondamentaux individuels, une telle protection ne pouvant qu’être de peu d’aide face à la grande diversité des migrations en question. Au contraire, le caractère souvent indirect du lien de causalité entre changement environnemental et migrations nécessite une approche collective et au cas par cas des différents flux migratoires induits par des changements environnementaux. Des solutions ad hoc, adoptées dans des cadres régionaux, voire bilatéraux, seraient ainsi préférables à l’approche monolithique d’une convention universelle et unique sur le modèle de la Convention de Genève relative au statut des réfugiés.
Robin Perry
Résumé: Les institutions consacrées au développement international ont adopté les Documents de stratégie pour la réduction de la pauvreté (« Poverty Reduction Strategy Papers » ou PRSP) en tant qu’instrument principal pour promouvoir une conception du développement « post- Washington » plus sensible aux considérations sociales. Plus précisément, les PRSP sont devenus un vecteur essentiel pour intégrer les droits de la personne aux stratégies de développement, dans le but que la réalisation des droits de la personne devienne un objectif, et non simplement un moyen, du développement.
Malgré cette rhétorique fleurie, force est de constater que le concept de développement continue de souffrir de ses orthodoxies. Les PRSP ont la capacité de neutraliser les aspects politiques des droits de la personne et d’occuper l’espace dynamique dans lequel ces droits pourraient normalement opérer. En bref, la réduction de la pauvreté est devenue le véhicule institutionnel par excellence pour façonner l’application des droits de la personne et l’orienter vers la réalisation d’une conception consensuelle et orthodoxe du développement. Ce faisant, la réduction de la pauvreté empêche le potentiel normatif des droits de la personne d’inclure une articulation des objectifs du développement allant au-delà du consensus. Ainsi, d’une part, les droits de la personne ont une forme établie, positiviste et « universelle » au sein du développement; d’autre part, ils conservent une forme indéfinie au sein des sociétés civiles.
Richard K. Norton
En revue: Takings International, par Rachelle Alterman
Equality and Environmental Protection: a constitutional approach in the Navarro case
Érika Fontánez-Torres
En Revue: le cas Navarro
Résumé : La protection de l’environnement et la quête de la justice sociale entrent souvent en tension. Il n’est pas rare qu’elles donnent lieu à des objectifs contradictoires ou se chevauchant. L’affaire « Navarro », à la Cour constitutionnelle de Colombie, illustre ces tensions. Cette affaire constitue un exemple de ce que certains appellent la justice environnementale, ou plus particulièrement « la justice environnementale à l’envers ». En privilégiant une approche de justice environnementale et socio-juridique, cet article présentera l’affaire « Navarro » et en fera l’analyse. Il sera argumenté que les controverses de politiques environnementales ne peuvent pas être déliées des rapports de force et des problématiques de droits sociaux et économiques. La régulation de l’environnement devrait garantir que les droits sociaux et individuels ne soient pas affectés déraisonnablement. Elle devrait aussi prendre en compte les relations de pouvoir, l’égalité et la justice sociale, et inclure les groupes désavantagés dans les prises de décision et la mise en oeuvre de la régulation. L’affaire « Navarro » démontre que les actions prises pour protéger l’environnement sont indissociables de la justice sociale et de l’égalité.